Située au cœur de la Martinique, la ville du Lamentin tire son nom des lamantins, ces paisibles mammifères aquatiques qui peuplaient autrefois ses rivières, notamment la Lézarde et le canal du Lamentin. Véritables symboles du territoire, ces « vaches de mer » disparurent progressivement sous la pression de la chasse coloniale. Une statue à l’entrée de l’Hôtel de Ville rappelle aujourd’hui leur présence.

Dès le XVIIe siècle, le Lamentin devient un lieu de peuplement actif. En 1687, une première chapelle est érigée sur la rive gauche de la Lézarde, à Durocher. Menacée par les crues, elle sera déplacée sur son emplacement actuel en 1699. La paroisse, administrée par les Capucins, s’organise autour d’un réseau de notables et d’un commissaire commandant désigné par le Gouverneur. Dès 1830, un Conseil de Fabrique structure l’administration paroissiale avant l’officialisation de la commune.

Le 12 juin 1837, le Lamentin est officiellement érigé en commune par décret du baron de Mackau, gouverneur de la Martinique. Le premier Conseil Municipal est élu cette même année. Le Lamentin devient alors un territoire rural actif et prospère, notamment grâce à sa vaste plaine alluviale fertile. Traversée par deux grands cours d’eau, la commune développe des activités agricoles florissantes : canne à sucre, café, cacao, cultures vivrières, mais aussi poterie, vannerie, four à chaux…

Au XIXe siècle, le Lamentin devient un centre névralgique de la production sucrière avec plus de 40 sucreries recensées. En 1848, après l’abolition de l’esclavage, la ville conserve son importance économique et voit émerger une nouvelle gouvernance locale, marquée par l’élection d’affranchis au conseil municipal. En 1862, l’importance de la commune suscite l’inquiétude du pouvoir colonial qui décide de détacher une portion de son territoire pour fonder la commune de Saint-Joseph. La même année, l’usine centrale de Lareinty est inaugurée.

Le Lamentin s’inscrit également dans l’histoire sociale et politique de la Martinique : en 1790, la commune est le théâtre de la bataille de l’Acajou entre troupes royalistes et révolutionnaires. Au XXe siècle, elle est marquée par des événements marquants comme l’affaire Aliker (1936) ou les mobilisations du 24 mars 1961.

La seconde moitié du siècle est synonyme de modernisation. L’aéroport international Aimé Césaire est implanté sur son territoire en 1950, renforçant son rôle de ville carrefour. De 1963 à 1980, les zones industrielles de La Lézarde, Jambette, Californie et Place d’Armes transforment le paysage économique du Lamentin. En 1981, malgré l’opposition du maire, l’usine de Lareinty ferme définitivement ses portes.

Politiquement, la ville s’impose comme un bastion de luttes sociales et d’innovation municipale. En 1945, Fernand Guilon devient le premier maire communiste. Il est suivi par Georges Gratiant, qui engage la ville dans une profonde transformation (écoles, crèches, infrastructures culturelles et sportives). En 1989, Pierre Samot poursuit cette dynamique, notamment à travers les grands projets d’aménagement urbain. Depuis 2020, David Zobda lui succède, avec la volonté de poursuivre le développement d’un Lamentin moderne, solidaire et résilient à travers des initiatives comme le projet « Cœur de Ville ».

De ses origines agricoles à son rôle central dans l’économie martiniquaise contemporaine, Le Lamentin incarne une histoire riche, forgée par les hommes, les luttes, les terres et les eaux qui l’ont nourrie. Aujourd’hui encore, son dynamisme, sa diversité et sa mémoire collective en font une ville à la fois tournée vers son passé et résolument engagée dans l’avenir.